La question de l’exploitation avec un ou deux agents m’intéresse particulièrement et je cherche toujours des renseignements sur cette question, pour tous les réseaux français.
Justement, dans une documentation publicitaire, que j’avais aperçue sur
Ebay ou sur
Delcampe, figuraient divers types d'autobus Chausson, à un seul ou à deux agents.
Ce dépliant publié par Chausson est rédigé en anglais, il comporte quatre pages et date de 1954. Les véhicules présentés étaient des AP52 (avant plat, arrière bombé à trois fenêtres, pavillon surbaissé). Il n'y avait plus de nez-de-cochon mais les APU n'étaient peut-être pas encore au catalogue.
La qualité des clichés fournis par la vendeur était au-dessous de tout. La typo des textes était presque illisible, avec d'énormes pixels. Bien sûr il aurait suffi de l'acheter, mais il y avait juste un souci : le prix exorbitant. Le vendeur était aux USA, si je me souviens bien.
Dans ce document il y avait des indications précieuses, notamment le diagramme du plan de ces autobus :
— le modèle à un agent pour Bordeaux (CGFTE), trois portes en 222 ;
— celui de Lyon (OTL), à deux agents, avec entrée par l’arrière (trois portes en 422) ;
— le modèle de Lille-Roubaix-Tourcoing (ELRT),
à deux agents, à deux portes en 402 et entrée par l’arrière ; c’est d’un grand intérêt car en général on ne voit que des photos de Chausson ELRT à un seul agent et, si j’avais un présomption pour une éventuelle et ancienne exploitation avec deux agents, je n’en avais aucune preuve ;
— enfin, et pas le moins intéressant, celui pour Rouen (CTR), à trois portes en 222, à deux agents mais avec cette rare particularité :
l’accès se faisait par l’avant, le poste du receveur, adossé au flanc droit, était situé entre les portes avant et médiane.Aux États-Unis, dans les grosses motrices de tramways Peter Witt construites à partir de 1921, le receveur était placé d’une façon assez semblable, mais il était adossé au flanc gauche, face à la porte centrale, qui était réservée à la sortie (il n'y avait en principe pas de porte arrière). On montait par l'avant et on payait en passant devant le receveur (on pouvait alors s'assoir dans la partie avant ou la partie arrière) ou seulement avant de descendre : le principe de perception était le
Pay as you pass, ainsi on ne payait pas forcément dès la montée, on pouvait même faire tout le voyage (mais en restant dans la partie avant) et ne payer qu'avant de descendre.
En France cette implantation atypique du poste du receveur avait pour avantage de permettre, selon les heures ou les lignes, une exploitation à un seul ou à deux agents, toujours par la même porte et sans changer le sens de circulation des voyageurs. Je l’avais constatée aussi à Orléans en 1967 ou 1968, sur des Chausson AP52 et sur des PH80. J’y avais pris un AP52 de la TREC ainsi disposé, il y avait bien un receveur à son poste, c’était sur la ligne B, Grand-Villiers—Paul Bert. Mais sur le PH80 que j’y avais aussi vu, le siège du receveur n’était pas au milieu mais juste après la porte avant, je ne sais plus si j’avais roulé dedans (sans receveur) ou s’il était garé. Il roulait de tels bus sur la ligne J (Acacias—Candole), mais sans receveurs.
J’avais vu aussi à Poitiers, en 1967, des bus compatibles avec un ou deux agents : sur de petits PBK6 (ceux qui avaient remplacé les trolleys), et sur un SC10. Une photo de Jean-Henri Manara montre aussi un bus Citroën poitevin ainsi aménagé. Mais à Poitiers le receveur, adossé au flanc droit, était placé juste après la porte avant. Malheureusement le SC10, à portes en 402, était garé hors service, quant aux Berliet PBK6 je ne sais plus si le siège (situé après la porte avant décalée après l’essieu) était occupé à ce moment-là par un receveur ou par un voyageur. Et je n’avais pas vu de Citroën — ce n’était pas mon modèle préféré, comme un truand le dit dans
Les tontons flingueurs, au sujet des chars Patton.
À Grenoble la première tranche de trolleybus Renault ER100 était aussi équipée d’un poste de receveur après la porte avant.
Malgré la qualité déplorable, ou plutôt immonde, des images j’ai redessiné le diagramme du modèle de Rouen, à cause de cette particularité dans l’implantation du poste du receveur, très atypique et qui a aussi été appliquée sur les SC4b rouennais (le modèle rallongé à trois portes en 444, avec un capot saillant d’une esthétique tragique). Sur les nombreuses photos des véhicules rouennais, prises par Jean-Henri Manara, on n’aperçoit pas de poste de receveur, sans doute parce qu’il était rudimentaire et que le siège n'était pas surélevé.
Ces diagrammes de la pub sont d’un grand intérêt. Voici celui des AP52 de Rouen.
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Dans cette documentation Chausson de 1957 on voyait aussi :
— une photo d’un bus de la RATP, à deux agents, trois portes en 422, sur la ligne 28 ;
— des illustrations d’ambiance dessinées à la plume dans un style vieillot et un peu maladroit ;
— une carte de France et une autre du monde, toutes deux très sommaires, avec la localisation des villes clientes.
Pour qui serait intéressé, elle est toujours à vendre depuis au moins un an, voici son adresse sur Ebay :
https://www.ebay.ie/itm/1954-Chausson-T ... XQwwlSCOkNIl faut tout de même compter 62 dollars avec le port (± 49 euros), pour quatre pages seulement !
Sur tous les diagrammes des Chausson figure à l'arrière gauche une porte battante qui servait d'issue de secours, en plus des quelques vitres latérales que l'on pouvait relever ou briser.
À Angers les Renault-Saviem R4201 (probablement) et R4211 (sûrement) étaient équipés de portes battantes à l'arrière gauche, avec un loquet rudimentaire pour les condamner (sur les n° 50 et 59 à deux portes en 033 il y en avait effectivement une à gauche, voir le sujet
« On a retrouvé le 52 ! » où une photo montre cette porte, mais à droite je ne sais plus). Il n'y en avait pas sur les Berliet.
Sur les Chausson des Transports Démas (ex-Siroux) je pense qu'il n'y avait pas une telle porte sur le Chausson APU. J'ai oublié pour l'AP52 avec cabine de receveur et capot de ligne. Les SC4 ex-78 n'en n'avaient pas, les Renault ex-Nancy R42314 non plus.
À vrai dire, ces portes qu'on aurait facilement pu ouvrir pendant la marche pouvaient être plus dangereuses que sécurisantes.
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• Nota : ce diagramme a été réalisé à partir d'une image très dégradée. Il se peut qu'il y ait des erreurs ou approximations.